mercredi 24 mars 2010

CHAPITRE IX

Les récréations



Nous avons la chance d’avoir de spacieuses cours, bien délimitées selon les classes : la grande esplanade le long de la chapelle, la petite près du Calvaire et celle de St Michel sous sa statue, entre un vieux catalpas et un superbe saule pleureur. Nous avons pour consigne de jouer et non de bavarder ; C’est avec un réel plaisir que plus tard s’organisent nos parties de balles aux prisonniers, balle au camp, gagne-terrain, gendarmes et voleurs, jeu du loup et de l’agneau. Nous formons des équipes. Anne me rappelle que nous jouons au drapeau, la lutte est acharnée entre nous, à celle qui court le plus vite et celle qui feinte l’autre. Selon la mode ou les saisons, nous jouons à la corde, une très longue corde où l’on peut sauter à plusieurs en même temps, aux marelles, à l’élastique, au diabolo… On ne s’ennuie jamais. Là se tissent les amitiés, au gré des affinités ou des rivalités. Quand on entend trois petits coups de cloche, cela veut dire qu’une élève s’est blessée, où est Sœur Cécile ? le téléphone portable n’existe pas.

Les jours de pluie, quelques classes vont dans la salle de récréation en dessous de la chapelle, les autres sont dans la salle de gymnastique. Des rondes, j’en connais un bataillon, que les aînées nous apprennent. Pour mémoire j’en cite quelques-unes : « Passe, passe, petit passe », « Nous n’irons plus au bois», « Un fermier dans son pré »…Hormis ces rondes, chaînes et parties de pris-pris, aucun jeu n’y est réellement possible, ce ne sont que cris, bousculades, disputes, chutes, ( Marie-Pierre Verlay s’y déboîte le bras, son coude fait un drôle d’accent circonflexe), on ne s’entend pas, le mieux est d’aller faire la queue devant les toilettes. La porte des cabinets ferme de l’intérieur bien sûr. A l’extérieur un petit écriteau en arc de cercle sur lequel on peut lire : occupé ou libre. Le grand jeu consiste à faire pivoter le verrou avec l’index de telle sorte que l’on puisse voir l’occupante assise sur le trône ! Ce qui n’est pas du goût de tout le monde, encore moins de la surveillante.